Interview de Mathias Jardin 1/3 – Les arts martiaux ont guidé ma vie
Mathias Jardin est l’une des figures du JJB français que l’on ne présente plus. Combattant de haut niveau, arbitre à l’IBJJF et aussi coach à la GF Team, il marque le paysage français avec ses multiples casquettes et son engagement pour notre art martial. Lors de son passage à Strasbourg pour la Coupe de Zone Est, je me suis mise en mode « Clair Chazal » pour vous le faire découvrir autrement. Pour ce premier opus, je vous invite à découvrir son parcours et ses sacrifices de combattant.
Avant de faire du jiu-jits brésilien, tu as pratiqué le judo et la luta livre. Qu’as-tu gardé de ces deux arts martiaux dans ton jeu de jiu-jitsuka ?
J’ai gardé beaucoup de choses du judo puisque j’ai commencé à en faire à l’âge de 5 ans et que je n’ai jamais arrêté de le pratiquer. Je m’entraîne encore une fois par semaine dans un club de haut niveau même si je ne fais plus de compétition. Le judo m’apporte beaucoup pour la partie debout. S’il m’est possible de ne pas tirer la garde, je vais plutôt rester debout et si l’occasion se présente je fais tomber l’adversaire.
Au-delà de l’aspect technique, il a construit ma vie, ma manière d’être avec les autres : le respect, le fair-play mais aussi le fait d’avoir un esprit sain dans un corps sain. Le code moral a vraiment guidé dans ma vie.
Lorsque j’étais au lycée, je suis rentré en sport-étude. J’ai donc pratiqué le judo à un bon niveau national. Ce qui m’a gêné dans le judo et m’a donné envie de voir ailleurs, ceux sont les trop nombreuses restrictions imposées par l’arbitrage.
La luta livre est l’art martial qui m’a fait découvrir le sol. Je l’ai commencé par hasard et c’est par ce biais que j’ai découvert le jiu-jitsu brésilien. J’en garde l’enseignement d’un puriste brésilien, Flavio Santiago, et plus particulièrement ce jeu qu’il nous enseignait avec une garde à moitié demi-garde, à moitié garde papillon. Ceux sont des éléments que l’on peut retrouver dans mon jeu même si je ne pense pas que l’on puisse l’identifier à celui d’un pratiquant de luta livre.
Tu as eu une carrière de haut-niveau en judo puis en JJB. Lorsque tu en parles dans le film “L’homme de l’ombre”, tu dis que “quand la passion est là, peu importe les sacrifices”. Quels ont été pour toi les plus grands sacrifices pour mener à bien ces carrières ?
J’en ai fait beaucoup mais je pense que ce serait égoïste de ne parler que de moi. Je suis en couple depuis sept ans, je suis marié et j’ai un enfant. Je pense que les plus gros sacrifices c’est ma femme qui les a faits. C’est elle qui est toute seule tous les soirs, les week-ends parfois même durant une semaine. Lorsque nous n’avions pas d’enfant ça allait mais maintenant elle doit tout gérer.
Il y a aussi eu les régimes pendant des années… Noël dernier était le premier depuis près de 8 ans où j’ai à nouveau pu manger du foie gras. En fait ce ne sont pas de gros sacrifices mais plutôt un cumul de petits car les régimes jouent sur l’humeur, sur le moral, sur comment on se sent le jour J, son caractère… donc bon, ça peut être pénible.
Ensuite il y a l’aspect financier. Il ne faut pas le nier, pour vivre du jiu-jitsu brésilien il faut beaucoup de dépenses avant de gagner de l’argent. Le temps de percer, d’arriver à avoir un sponsor, des voyages dédommagés, il faut faire beaucoup de sacrifices financiers. J’ai également voulu apprendre avec les meilleurs alors je suis parti six mois au Brésil. Est-ce vraiment un sacrifice ?
Je ne vais pas me plaindre mais je pense que ceux sont surtout des sacrifices humains que l’on fait. Les sorties avec les amis que je déclinais à l’approche d’une compétition parce qu’il me fallait bien dormir et ne pas boire d’alcool pour ne pas interférer dans ma préparation. A force, les amis t’appellent moins parce que de toute façon, “Mathias ne sort jamais…”. C’est ainsi une autre relation qui se construit avec eux, je les vois différemment.
Ta femme est donc un gros pilier de ton entourage. Tu dis justement dans le film “L’homme de l’ombre” que “pour réussir, il faut être bien entouré”. Quels sont les autres piliers de ton entourage qui te soutiennent pour mener à bien tes projets ?
Lorsque j’ai dit cela, je ne parlais pas forcément que de ma femme, je parlais d’un tout. Je pense que les champions sont faits d’une équipe. On fait un sport individuel mais il y a cet esprit d’équipe dans le jiu-jitsu qui est très beau. Même si on est tout seul sur le tapis, c’est toute l’équipe qui gagne. Il y a une phrase que je répète souvent : on ne peut arriver seul à endroit.
La première personne qui compte beaucoup pour moi, c’est mon préparateur physique Sébastien Calloud. C’est un judoka qui me suit depuis l’âge de quinze ans et qui dispose d’une vraie crédibilité. En plus d’avoir un master de préparation physique, il est ceinture noire de judo et il combat en 1ère division. Il porte aussi le grade de ceinture noire de JJB et de luta livre. Ce qu’il nous propose, il l’a donc testé tout d’abord sur lui-même.
Il y a ensuite tous mes partenaires, élèves et professeurs, qui m’accompagnent au quotidien sur les tatamis. La GF Team possède un gros groupe de compétiteurs et c’est top d’en avoir, même en ceinture bleue, qui ont un niveau tel que l’on peut se reposer sur eux pour nous coacher et travailler de nouvelles techniques. Cet effet de groupe est vraiment beau dans ce sport et il me sert beaucoup.
Dans le film “L’homme de l’ombre”“ tu dis que “si tes rêves ne te font pas assez peur, c’est qu’ils ne sont pas assez grands.” Quel est celui qui te fait actuellement le plus peur ?
J’aime beaucoup cette phrase (rire…). C’est un rêve qui me paraît inaccessible : être champion du monde ceinture noire adulte. Ce serait une réelle consécration, quelque chose qui n’a jamais été fait en France, à par Laurence Cousin chez les femmes. Chez les hommes ce n’est pas le cas, il n’y a même pas eu de médailles jusqu’à présent. C’est quelque chose qui me fait peur et qui me parait insurmontable.
Si vous souhaitez avoir plus de détails sur le parcours de Mathias Jardin, je vous invite à lire l’article de Jits et à écouter le poadcast de Castagne FM à ce sujet. En attendant, je vous donne rendez-vous très bientôt pour découvrir sa fonction d’arbitre à la CFJJB et sa casquette de coach à la GF Team.
Un grand merci à Guillaume, mon ami du JJB pour ses photos !
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